La GUERRE de SUCCESSION D’ESPAGNE dans LES ALPES

Mardi 23 octobre 2018 // 4 : Des GUERRES d’ITALIE à la REVOLUTION

Le FRONT des ALPES pendant la GUERRE de SUCCESSION D’ESPAGNE 1701-1712

les CAUSES du CONFLIT
Novembre 1700 : le roi d’Espagne Charles II meurt sans héritier. Son héritage comprend l’Espagne, la Belgique, le Milanais, Naples et la Sicile et l’Amérique hispanique. Le roi de France Louis XIV et l’empereur Léopold sont tous les deux fils et maris de princesses espagnoles et peuvent revendiquer la succession. Or Charles II a fait un testament en faveur du duc d’Anjou, deuxième petit-fils du roi de France. Louis XIV accepte ce testament et proclame roi d’Espagne son petit-fils sous le nom de Philippe V qui rejoint l’Espagne en février 1701. L’empereur et les autres puissances européennes soutiennent l’archiduc Charles deuxième fils de l’Empereur qui s’institue Charles III. La guerre est officiellement déclarée en mai 1702 : elle sera longue, coûteuse et difficile pour la France. Elle va se dérouler sur la frontière nord et en Espagne, mais aussi en Italie et donc sur le front des Alpes.

Titulature de Victor-Amédée II

CONFLIT en ITALIE - CATINAT et VILLEROY : 1701
Dès 1701 il faut défendre le Milanais espagnol. En avril 15000 hommes commandés par Tessé passent en Piémont et viennent stationner à Parme et Modène. Le Duc de Savoie Victor-Amédée II est notre allié ; le maréchal Catinat est envoyé auprès de lui. L’armée impériale commandée par le prince Eugène de Savoie, cousin du Duc, bouscule Tessé au combat de Carpi, qui doit se replier. Catinat regroupe les troupes sur Villafranca, mais le duc de Savoie étant très attentiste, il se replie. Louis XIV envoie le maréchal de Villeroy prendre le commandement - mauvais choix - ; il passe à l’attaque à Chiari et se fait battre. De plus en décembre Villeroy est fait prisonnier à Crémone sur un coup de main du prince Eugène.

Le Duc de Vendôme

CONFLIT en ITALIE - VENDÔME 1702-1706
Louis XIV envoie alors au commandement le duc de Vendôme. Tessé est assiégé dans Mantoue ; les deux armées manœuvrent sans résultat décisif ; la bataille de Luzzara en août reste indécise.
En 1703 le duc de Savoie est déçu, car Louis XIV ne peut plus lui céder le Milanais espagnol promis ; il change de camp et s’allie à l’Empereur. Pendant l’été Vendôme fait désarmer une partie des troupes piémontaises, la Savoie est occupée par les troupes françaises, sauf Montmélian qui résiste un an pour être ensuite démantelée.
En 1704 Vendôme prend Suse, Vercelli, Bard et Verrua prise après 6 mois de siège en avril 1705. À cette date le maréchal de la Feuillade a investi le comté de Nice, dont les forteresses se rendent sauf le château de Nice. Vendôme assiège Chivasso et affronte le prince Eugène en août à Cassano dans une bataille indécise. En fin d’année le maréchal de Berwick assiège Nice et son château est pris en janvier 1706 et démantelé.
Au printemps 1706 Vendôme est le plus rapide et met en déroute une partie de l’armée impériale à Calcinato et la Feuillade commence le siège de Turin, que le duc de Savoie quitte. Vendôme appelé en Flandres est remplacé par Marsin. Celui-ci est débordé par les impériaux passés au sud du Po, défait et tué devant Turin en septembre : l’armée française doit se replier en désordre sur la frontière des Alpes. L’Italie du nord est perdue.

Eugène de Savoie

La DÉFENSE des FRONTIÈRES - TESSÉ, VILLARS et BERWICK 1707 -1712
En 1707 Tessé reconstitue une armée des Alpes et organise la défense. En juillet-août le prince Eugène passe le col de Tende avec 30000 hommes, prend Nice, passe le Var et vient assiéger Toulon : mais la garnison contre-attaque et les impériaux doit faire retraite. L’année se termine mal, car le prince Eugène réussit à s’emparer de Suse et du mont-Cenis.
1708 le maréchal de Villars prend le commandement, reste sur la défensive et contient une tentative du duc de Savoie sur Briançon. Il est remplacé en 1709 sur les "frontières du Piémont" par le maréchal de Berwick qui continue une politique d’organisation défensive très organisée. Le gros de ses troupes reste en position centrale à Briançon, prêt à soutenir les points d’appui en cas d’attaque. Berwick crée le camp retranché de Tournoux ; il dispose de 84 bataillons et 30 escadrons. À l’été 1709 une attaque austro-piémontaise (comte de Thaun) pénètre en Savoie par la Maurienne et la Tarentaise, s’avance vers Annecy, mais rebrousse chemin devant le gros des forces de Berwick , tandis qu’une attaque au col de Montgenèvre est vigoureusement repoussée.

Berwick

En 1710 une nouvelle tentative d’invasion en direction de la vallée de l’Ubaye avorte devant les forces que Berwick a positionnées à Tournoux et au col de Vars. Des 7 fortifications crées par Berwick, il en subsiste une (reconstruite) la "redoute de Berwick" dans la haute vallée de l’Ubaye sur la route du col de Vars. En 1711 tandis que des pourparlers secrets sont engagés avec le duc de Savoie, celui-ci fait une tentative en direction de la Maurienne et de la Tarentaise, descend jusqu’à Montmélian et sa cavalerie vient occuper Chambéry. Berwick vient se positionner devant Fort-Barraux : il attend que le duc de Savoie qui n’ose pas attaquer décide de se retirer...
En 1712 pas d’action majeure dans les Alpes, alors que la victoire du maréchal de Villars à Denain met fin au conflit.

La "redoute de Berwick" près de fort-Tournoux

La PAIX 1713
Les pourparlers de paix (Traité d’Utrecht) sont très favorables à Victor-Amédée II : il obtient la Sicile avec le titre de Roi et une partie du Milanais. Louis XIV lui restitue la Savoie et le comté de Nice, lui cède l’est du Briançonnais avec Exilles, Fénestrelle, Oulx, Bardonnèche. Nous perdons donc une commodité de débouché à partir du col du Montgenèvre. En compensation la France garde la vallée de Barcelonnette.
Le Duc de Savoie avec le tire de Roi prend une autre dimension et devient un acteur de plus en plus important de l’histoire d’Italie, même s’il doit renoncer à la Sicile en 1720 et se contenter de la Sardaigne en dédommagement.
Cette nouvelle occupation française de la Savoie, après celle de 1690-96, a été encore plus dure pour les paysans soumis aux réquisitions, alors que les autorités civiles françaises firent preuve de modération. L’occupation suivante de la la Savoie sera espagnole (1740-48)...

Source : A.Doumenc - Mémorial de la terre de France - contribution à l’histoire militaire de nos provinces -Arthaud 1944 /R.Devos B.Grosperrin - La Savoie de la Réforme à la Révolution